Les nouvelles ordonnances liées à l’énergie vont entrer en vigueur progressivement entre janvier 2025 et 2026. À la clé, d’importants changements pour les consommateurs, les fournisseurs et les distributeurs. Le point avec le directeur général d’ALTIS.
Près de 69% des Suisses ont accepté en juin la nouvelle loi sur l’électricité. Quand sera-t-elle mise en œuvre ?
Deux importantes lois sont concernées, celle sur l’énergie et celle sur l’approvisionnement en électricité. De nouvelles ordonnances d’application ont été préparées au niveau national. Les professionnels du domaine, dont nous faisons partie en tant que gestionnaire de réseau de distribution (GRD) et fournisseur, ont été consultés, et nous attendons impatiemment la validation de ces ordonnances et leur mise en œuvre: une partie pour janvier 2025, le reste en 2026. Globalement, je dirais que c’est très complexe – plusieurs centaines de pages –, mais très positif aussi! Trois objectifs guident ce nouveau cadre législatif: la neutralité climatique, la sécurité d’approvisionnement, et le développement des énergies renouvelables.
Comment aider les gens à consommer moins d’électricité ?
Nous le faisons déjà à travers différentes démarches, dont la principale est l’Énergithèque (lire l’encadré ci-dessous), où nous accompagnons gratuitement les consommateurs, promoteurs et architectes vers davantage de sobriété et d’efficience. La prise de conscience est aussi un levier indispensable pour revoir ses habitudes. Ainsi, nous avons jusqu’à fin 2027 pour doter 80% de nos clients d’un compteur d’électricité intelligent, qui nous permettra de les informer sur la façon dont ils consomment. Mais la grande nouveau- té, c’est la transformation du citoyen en producteur et/ou autoconsommateur.
Est-ce vraiment intéressant pour les propriétaires de produire de l’électricité solaire ?
Bien entendu. Tout y est favorable. Le prix des panneaux photovoltaïques a baissé, tandis que celui de l’électricité a augmenté. Dès lors, produire et consommer sa propre énergie restera très souvent plus avantageux que de l’acheter. Un peu comme produire ses propres légumes dans son potager pour augmenter son indépendance. ALTIS accompagne déjà les propriétaires avec son partenaire solaire iELLO.
« La nouvelle loi encourage fortement les gens à devenir producteurs et autoconsommateurs de leur électricité. À nous de les accompagner. »
Le réseau supportera-t-il toutes ces petites productions privées ?
Oui ! Certes, nous devrons poursuivre nos investissements, mais si les gens deviennent non seulement producteurs, mais aussi autoconsommateurs, le défi peut être relevé. La future loi encourage très fortement cela, avec deux nouvelles formules, en plus des communautés d’autoconsommation (CA) et des regroupements de consommation propre (RCP) : les RCP virtuels et les communautés électriques locales (CEL).
Que prône ce nouveau cadre législatif ?
Le message central pourrait se résumer par : développer les énergies renouvelables pour remplacer le nucléaire, consommer moins d’électricité, mais aussi renforcer le rendement des installations et récupérer les rejets de chaleur. Il est nécessaire de le faire ici et maintenant, sans attendre.
Comment le consommateur peut-il agir pour aller dans ce sens ?
Un accompagnement est prévu. Le programme Bâtiments, qui alloue des subventions pour les travaux d’isolation, de rénovation et de remplacement des systèmes de chauffage, sera renforcé. Par exemple, les déductions fiscales seront étendues sur trois ans, les frais de démolition pourraient être soutenus, tout comme le remplacement d’appareils électroménagers par des modèles moins gourmands en énergie.
« Il faut consommer moins d’électricité, mieux, augmenter le rendement des installations et récupérer les rejets de chaleur. Ici et maintenant, sans attendre. »
Il est donc recommandé de faire alliance avec ses voisins ?
(Rires) Oui, mais pas seulement. Les regroupements de consommation propre (RCP) virtuels permettent effectivement à quelqu’un qui produirait trop d’énergie solaire de la vendre virtuellement à un voisin qui en aurait besoin. Dans le cadre d’une communauté électrique locale (CEL), un quartier ou même une commune entière pourra se déclarer producteur et consommateur, avec ses propres règles et prix. Dans tous les cas, le GRD que nous sommes doit mettre à disposition le réseau et accompagner les démarches. Cela représente un énorme défi technique, digital pour la gestion des flux et le comptage, mais aussi pour les aspects juridiques, avec la mise à disposition de contrats types par exemple, et administratifs, avec la facturation.
Que faire si, malgré tout, on se retrouve avec un surplus d’électricité ?
Il serait judicieux de mettre en place des solutions de stockage. Soyons cependant clairs: certes, une batterie domestique aujourd’hui est devenue beaucoup plus accessible, mais ce type d’installation ne peut pas stocker efficacement sur des semaines ou des mois. Il s’agit donc de consommer en priorité quand le soleil brille, en programmant ses appareils électroménagers en journée par exemple, et de consommer le soir la quantité d’électricité stockée, en rechargeant sa voiture, son vélo, etc. On peut aussi chauffer son eau sanitaire « en avance » avec sa pompe à chaleur ou ses panneaux thermiques.